Actualité législative – octobre 2017

 

Suppression des juridictions de proximité, simplification des assignations en contestation des saisies-attribution et des saisies de valeurs mobilières, modification de la procédure d’appel et nouvelle procédure de saisies-conservatoires et d’exécution sur les biens appartenant aux Etats étrangers

 

I – Suppression des juridictions de proximité :

A compter du 1er juillet 2017, les juridictions de proximités sont supprimées et l’ensemble des procédures en cours devant ces juridictions sont transférées en l’état au Tribunal d’instance.

L’article 39 de la loi organique n° 2016-1090 du 8 août 2016 supprimant les juridictions de proximité entre en vigueur le 1er juillet 2017.

Disparaîtront avec ces juridictions les juges de proximité, ce qui replace l’organisation du tribunal d’instance dans la situation d’avant 2002. À partir du 1er juillet 2017, « en matière civile, les procédures en cours devant les juridictions de proximité sont transférées en l’état au tribunal d’instance.».

L’ensemble des litiges, des injonctions de payer et des injonctions de faire résultant d’une obligation contractuelle, dont la valeur est inférieure à 10 000 €, ressortent donc désormais de la compétence d’attribution des tribunaux d’instance.

L’article 15 de la loi du 18 novembre 2016 prévoit que les procédures en cours devant les juridictions de proximité seront transférées en l’état au Tribunal d’instance sans que le justiciable n’ai besoin d’effectuer aucune formalité.

 

II – Simplification et allègement des assignations en contestation des saisies-attribution et des saisies des valeurs mobilières :

 

Le décret n° 2017-892 du 6 mai 2017 simplifie la procédure de contestation des saisies-attribution en étendant, pour l’huissier de justice délivrant l’assignation en contestation, le délai pour dénoncer celle-ci à l’huissier de justice ayant procédé à la saisie. Par ailleurs, le décret apporte une précision sur la nature de l’acte à déposer au greffe du JEX saisi de la contestation au plus tard le jour de l’audience.

Le Décret n° 2017-892 du 6 mai 2017 portant diverses mesures de modernisation et de simplification de la procédure civile a apporté des précisions bienvenues en matière de procédure de contestation de saisie-attribution et simplifie considérablement le travail des huissiers de justice en cette matière.

L’article R 211-11 du Code des procédures civiles d’exécution prévoit les modalités et les délais dans lesquels le débiteur visé par une saisie-attribution peut saisir le juge de l’exécution pour contester la mesure dont il fait l’objet.

Ce texte dispose notamment que la contestation doit être dénoncée « à peine d’irrecevabilité », par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie. Jusqu’au décret du 6 mai, le texte prévoyait que cette dénonciation devait impérativement intervenir le même jour que l’assignation en contestation.

La solution est exactement la même en matière de contestation de saisie des droits d’associés et des valeurs mobilières et de contestation d’un acte de conversion d’une saisie conservatoire de créance en saisie-attribution.

Le décret sanctionne de façon particulièrement sévère l’omission de cette formalité (irrecevabilité) et l’enfermait dans un délai particulièrement restreint ce qui posait aux huissiers de justice de sérieuses difficultés pratiques parfois insurmontables (dues notamment par exemple aux horaires de fermeture des bureaux de Poste) et qui pourtant engageait leur responsabilité.

L’article 45 du décret n° 2017-892 du 6 mai 2017 règle donc enfin cette problématique en étendant le délai de dénonciation de la contestation à l’huissier de justice de justice ayant procédé à la mesure jusqu’au premier jour ouvrable suivant la signification de l’assignation en contestation.

L’extension de ce délai de dénonciation, applicable depuis le 11 mai dernier, concerne non seulement les contestations de saisie-attribution (art. R211-11 CPCE) mais également de saisies de droits incorporels (art. R. 232-7 CPCE) et d’actes de conversions de saisies-conservatoires de créances (Art. R. 523-9 CPCE).

S’agissant de la nature du dépôt, au plus tard le jour de l’audience, de la copie de la contestation au greffe du juge de l’exécution, une problématique importante était née du décret n° 2012-783 du 30 mai 2012 codifiant la partie règlementaire du CPCE.

Ce décret, qui avait vocation à codifier à droit constant les dispositions réglementaires relatives aux procédures civiles d’exécution anciennement prévues par le décret du 31 juillet 1992, avait toutefois introduit de nouvelles dispositions et notamment donné naissance à une nouvelle sanction procédurale en prévoyant qu’à peine de caducité de l’assignation, l’auteur d’une contestation de saisie-attribution devait informer le tiers saisi par lettre simple de l’accomplissement de la formalité prévue à l’alinéa 2 (dénonciation de la contestation à l’huissier de justice qui a procédé à la saisie) et « [en remettre] une copie, à peine de caducité de l’assignation, au greffe du juge de l’exécution au plus tard le jour de l’audience ».

La rédaction de ce dernier alinéa posait de très grandes difficultés pratiques car il subsistait des interrogations sur la nature du document à déposer au greffe du JEX au plus tard le jour de l’audience.

Certaines juridictions du fond considéraient ainsi que le texte imposait la remise au greffe de la copie de la lettre simple adressée au tiers saisi. D’autres juridictions considéraient au contraire que le texte ne prévoyait seulement qu’une remise au greffe de la copie de l’assignation.

Le décret du 6 mai 2017 met ainsi fin définitivement à cette hésitation en indiquant au dernier alinéa de l’article R211-11 que c’est bien la copie de l’assignation qui doit être déposé au greffe au plus tard le jour de l’audience.

III – La procédure d’appel en matière civile :

Le décret n° n° 2017-891 du 6 mai 2017 relatif aux exceptions d’incompétence et à l’appel en matière civile (JO, 10 mai 2017) , est entré en vigueur le 1er septembre 2017 (art. 53 du décret).

Il modifie en profondeur le régime du recours portant sur les décisions statuant en matière d’exceptions d’incompétence (article 1 du décret, articles 75 à 91 du CPC).

La voie de recours du contredit (voie de recours exclusivement possible lorsque le juge se prononce sur la compétence sans statuer sur le fond du litige) est supprimée au profit de l’appel qui doit être régularisé dans les 15 jours à compter de la notification du jugement.

Par ailleurs, le décret modifie sensiblement la procédure de renvoi après cassation (Article 39 et 40 du décret, articles 1037 et 1037-1 du CPC).

Le délai pour saisir la cour de renvoi est désormais de deux mois à compter de la signification de l’arrêt de cassation (au lieu de quatre mois auparavant).

Dans la procédure à bref délai (automatique lorsque l’appel est relatif à une ordonnance de référé, à une décision en la forme des référés ou à une ordonnance du juge de la mise en état intervenant dans le cadre des 1° à 4° de l’article 776 du code de procédure civile), l’appelant doit signifier la déclaration d’appel dans les dix jours de la réception de l’avis de fixation qui lui est adressé par le greffe, à peine de caducité de la déclaration d’appel.

Ce délai est particulièrement bref et doit conduire à la plus grande vigilance.


IV – Nouvelle procédure de saisies-conservatoires et d’exécution sur les biens appartenant aux Etats étrangers :

La loi Transparence du 9 décembre 2016 a défini un nouveau cadre formel concernant les immunités d’exécution des Etats étrangers auparavant régi par le droit international coutumier. Si la loi reprend beaucoup de règles jurisprudentielles elle impose, s’agissant de la mise en œuvre des mesures de saisies, des exigences nouvelles et dérogatoires du droit commun.

Ainsi, même en possession d’un titre exécutoire, le créancier se voit désormais obligé de faire autoriser par le juge judiciaire toute mesure sur les biens d’un Etat étranger, selon une procédure sur requête dont le régime est précisé par le Décret du 6 mai 2017. Cette nouvelle procédure est entrée en vigueur le 11 mai 2017.

Une dépêche de présentation du nouveau régime d’autorisation préalable par le JEX de Paris des mesures d’exécution portant sur des biens appartenant à des Etats étrangers a été publiée et diffusée par la Direction des affaires civiles et du Sceaux auprès des juridictions le 4 août dernier, accompagnée de fiches techniques décrivant en détail la procédure applicable devant le JEX du TGI de Paris et rappelant les dispositions en vigueur sur le régime des immunités d’exécution dont bénéficient les Etats étrangers.

Les articles L. 111-1-1 à L. 111-1-3 du Code des procédures civiles d’exécution créés par l’article 59 de la loi dite « Transparence » ou « Sapin II » du 9 décembre 2016 encadrent désormais, en le clarifiant, le régime de protection des biens des États étrangers situés sur le territoire français.

Jusqu’à présent en effet, en l’absence de disposition légale, ce régime n’était exclusivement fixé que par la jurisprudence et les règles du droit international coutumier, ce dernier prévoyant que les États étrangers et leurs agents diplomatiques jouissent d’une immunité d’exécution de principe.

Le principe d’immunité de juridiction et d’exécution des États étrangers reconnu par la Cour de cassation n’était déjà pas toutefois absolu et la Cour de cassation, s’appuyant notamment sur la convention des Nations unies de 2004, jugeait qu’une mesure conservatoire ou une saisie sur des biens appartenant aux Etats étrangers était toujours possible lorsque, par exemple, l’Etat avait déclaré renoncer à son immunité d’exécution ou que le bien saisi avait été affecté à l’activité économique ou commerciale relevant du droit privé.

La loi Sapin II, puis le décret d’application du 6 mai 2017, entrés en vigueur le 11 mai dernier, encadrent désormais légalement le régime des mesures d’exécution et des saisies conservatoires des biens appartenant aux États étrangers.

La principale mesure de ce dispositif est de créer une procédure d’autorisation sur requête devant le JEX de Paris, exclusivement compétent en cette matière (le législateur ayant souhaité confier cette matière très technique et hautement délicate sur le plan diplomatique à un juge spécialisé), préalablement à toute mesure conservatoire ou d’exécution sur les biens appartenant aux Etats étranger (nouveaux art. L111-1-1 et R111-1 et s. du CPCE).

Il s’agit formellement, outre la compétence territoriale spécifique, d’une procédure classique d’ordonnance sur requête. Les textes règlementaires précisent que le juge est saisi d’une requête motivée qui doit être présentée en double exemplaire et comporter l’indication précise des pièces invoquées.

Le JEX de paris pourra autoriser la mesure par ordonnance motivée ou rejeter la requête. Dans ce dernier cas, le requérant pourra alors interjeter appel dans un délai de quinze jours.

Si le juge de l’exécution autorise la mesure, l’ordonnance est exécutoire au seul vu de la minute. Elle n’aura donc pas à être signifiée à l’État étranger avant d’être exécutée et la minute de l’ordonnance devra simplement être présentée par l’huissier de justice lorsqu’il procèdera à la mesure autorisée par l’ordonnance.

Par ailleurs, l’exécution de la mesure autorisée sera effectuée selon les dispositions du Code des procédures civiles d’exécution propres aux mesures mises en oeuvre. Ainsi, lorsque la mesure autorisée par l’ordonnance sera diligentée entre les mains d’un tiers détenteur, une dénonciation devra être faite à l’État étranger avec une copie de la requête et de l’ordonnance. L’État étranger aura ainsi la possibilité de saisir le juge de l’exécution en référé-rétractation.

Cette procédure d’autorisation préalable à toutes mesures conservatoire ou d’exécution a pour objectif de laisser au juge judiciaire, dans une matière susceptible de créer des tensions diplomatiques importantes, le soin d’apprécier si les conditions exigées à l’article L. 111-1-2 du Code des procédures civiles d’exécution pour que les immunités d’exécution soient levées sont bien réunis.

La requête devra notamment être accompagnée des moyens de preuve permettant au juge d’apprécier, alternativement :

–         que l’État débiteur a expressément consenti, antérieurement ou postérieurement au jugement, à l’application d’une telle mesure et à la levée de son immunité d’exécution ;

–         L’affectation du bien objet de la saisie à la satisfaction de la demande qui fait l’objet de la procédure au fond,

–         Ou que dans l’hypothèse où un jugement ou une sentence arbitrale a d’ores et déjà été rendu contre l’État concerné, l’exécution concerne un bien situé en France et spécifiquement utilisé ou destiné à être utilisé par l’État débiteur autrement qu’à des fins de service public non commerciales.